Face à l’inquiétante progression que connaît désormais la pandémie du coronavirus en Guinée, se met en place une union sacrée de tous pour endiguer la spirale. C’est ainsi que dans la préfecture de Kissidougou, dans la région de la savane, les fils et filles du terroir se mobilisent autour d’une structure dénommée « Save Kissidougou ». Au nombre des stratégies préconisées par cette nouvelle organisation, on note la sensibilisation assortie d’une campagne de distribution des kits d’hygiène dans les lieux publics. Et pour en savoir davantage sur les objectifs et les modalités d’action de la structure, notre rédaction s’est rapprochée de Sékou Traoré, le responsable à la planification et à l’organisation. Lisez…

D’où est partie l’idée de la création de Save Kissidougou et qu’est-ce que c’est ?
« Save Kissidougou, qui veut dire Sauvons Kissidougou, est une organisation humanitaire créée à la suite de la propagation de l’épidémie du nouveau coronavirus qui continue de faire des ravages à travers le monde. Aussi, nous nous sommes inspirés de la maladie à virus Ebola qui a frappé la Guinée et certains de ses voisins en 2014. C’est ainsi que les jeunes de Kissidougou que nous sommes, avons pris les devants en attendant que l’État ne réagisse. Nous avons estimé, étant les fils du terroir, qu’on doit mettre des initiatives en place pour faire face à cette épidémie.»
Pour mener le combat contre le nouveau coronavirus des moyens financiers et logistiques demeurent nécessaires. Et vu que vous êtes une structure naissante, comment entendez-vous vous y prendre ?
« Notre source de financement c’est la contribution individuelle de tous les membres qui composent cette structure. Au départ, nous étions 20 membres, donc nous avons estimé qu’en payant chacun 50 000 GNF, cela nous permettait d’avoir 20 kits d’hygiène. Nous sommes partis sur cette base. Ensuite, nous avons élargi la demande au niveau de nos frères et sœurs vivant non seulement ici à Kissidougou mais aussi ceux qui vivent à Conakry. Chacun a mis la main à la poche pour accompagner nos actions en faveur des populations. Voilà comment nous fonctionnons, nous ne bénéficions d’aucun financement de l’État, encore moins des institutions. »
Qu’est-ce qu’on peut retenir des actions menées par Save Kissidougou depuis sa création ?
« Nos activités ont commencé par l’identification des bénéficiaires, parce que nous avons fait un constat très amer. Des ressortissants de Kissidougou ont envoyé un important lot de kits d’hygiène et malheureusement ce sont les autorités préfectorales et communales qui se les sont partagées, alors qu’elles disposent des moyens ou de budgets leur permettant de se doter des kits d’hygiène. Ce qui n’est pas le cas des pauvres citoyens. Donc il était important pour nous d’aller sur le terrain pour identifier des potentiels bénéficiaires, des gens qui ne sont pas en mesure d’acheter un morceau de savon Diama à 2000 GNF. Nous avons également identifié des lieux de regroupement. Ces lieux de regroupements sont entre autres les forages dans les quartiers. Vous prenez un quartier par exemple où il n’y a que trois forages, ces forages sont fréquentés par 20 à 30 personnes par jour. Nous avons pensé qu’en plaçant des kits d’hygiène dans ces lieux, nous permettons aux citoyens d’être à l’abri de cette maladie. Au delà de ces forages, nous avons aussi identifié les guérisseurs traditionnels, parce que généralement pendant ces moments de crise sanitaire, beaucoup de citoyens pensent que le remède pourrait se trouver chez ces guérisseurs. Ces regroupements exposent non seulement les guérisseurs mais aussi les citoyens qui les fréquentent. Les bars-café, les espaces de thé où les jeunes se regroupent quotidiennement, parce qu’il n’y a pas d’école, toutes les activités sont au ralenti. Nous avons pensé que ces lieux favorisent la propagation du virus. Et il y a des petits marchés dans tous les quartiers et aucun de ces marchés n’avait bénéficié de kits d’hygiène. Dans ces marchés, nous avons mis en place des points focaux. Ces points ont pour rôle de veiller sur l’utilisation correcte de ces kits : faire sortir les kits le matin avec tous les nécessaires et les faire rentrer le soir après que tout le monde soit parti. Donc, il était important pour nous de faire cette première identification dans les 24 quartiers de Kissidougou et les deux grandes sous-préfectures qui sont sur la nationale notamment Djendê Minimou et Sangardo.»
Après cette étape d’identification, qu’est-ce que vous avez fait concrètement ?
« Sur la base des travaux d’identification, le besoin s’élevait en termes de kits à 460. A date, nous avons distribué 385 kits d’hygiène ; 800 morceaux de savons et 1000 bavettes communautaires. »
Précédemment vous disiez que vous avez anticipé en attendant que les autorités de Conakry ne réagissent. Avez-vous bénéficié de leurs soutiens ?
« Jusqu’ici, je parle en tant membre de la coordination préfectorale pour la lutte contre cette pandémie, nous n’avons rien reçu de la part de l’État, même un morceau de savon. Quand vous partez dans les centres de santé ou dans les hôpitaux, le personnel soignant n’a même pas de gants, encore moins de bavettes. C’est déplorable. Les citoyens sont exposés à cette maladie. »
Quel appel avez-vous à l’endroit du gouvernement mais aussi des bonnes volontés dans le cadre bien entendu de la lutte contre le Covid-19 ?
« Nous remercions tous nos frères qui ont bien voulu mettre la main à la poche pour accompagner les actions de Save Kissidougou et nous profitons de l’occasion pour leur dire que l’argent ou les kits d’hygiène qu’ils ont mis à notre disposition, ont été utilisés à bon escient. Nous lançons un appel à l’endroit des autorités administratives et de toutes les bonnes volontés de nous venir en aide. Nous renouvelons une fois encore notre appel à l’endroit de nos frères et de toutes les bonnes volontés de nous aider. Nous sommes un groupe de 35 jeunes volontaires, disponibles à travailler tous les jours pour combattre l’épidémie du nouveau coronavirus qui continue d’endeuiller des milliers de familles à travers le monde. »
Ci-dessous, nous vous proposons quelques images de la campagne de distribution des kits d’hygiène dans les villages de Kissidougou et d’autres localités voisines.







Propos recueillis par Diawara Thierno Oumar / todiawara@guineerealite.info